Sacha Goldberger

Sacha Goldberger, l’art du récit photographique hors cadre

Il ne photographie pas, il raconte. Sacha Goldberger, c’est ce genre d’artiste dont le travail se reconnaît en une seconde, parce qu’il ne ressemble à personne. Entre performance photographique, mise en scène cinématographique et hommage à ses héros personnels, il détourne les genres, les époques, et les conventions avec une jubilation presque enfantine.

Sacha Goldberger par © Studio Goldberger

Ancien directeur artistique dans la publicité, Sacha Goldberger s’est imposé dans le monde de la photographie par un virage inattendu et spectaculaire. Ses séries, comme Super Mamika, Marie-Antoinette is not dead ou The Gotham Family, mêlent pop culture, art classique, et humour décalé avec une précision d’orfèvre. Chaque image est un tableau vivant, pensé au millimètre près, où rien n’est laissé au hasard : ni le costume, ni la lumière, ni la moue du modèle.

Mais derrière cette maîtrise formelle, il y a surtout une obsession : le récit. « Je construis des histoires. Une photo doit être une scène de film arrêtée, une énigme qu’on a envie de résoudre », expliquait-il dans une interview. Une approche qui fait de lui un ovni dans la photographie française.

Le grand public le découvre en 2010 avec Mamika, sa série culte mettant en scène sa grand-mère de 93 ans déguisée en super-héroïne. Un projet aussi drôle que bouleversant, né d’un besoin profond : lutter contre la solitude de sa grand-mère. La série devient virale, propulsant Goldberger au rang de photographe à suivre. Mais au-delà du buzz, il y a l’émotion, brute et tendre, comme un cœur qui bat sous le latex du costume.

Mamika n’est pas qu’un personnage, c’est un manifeste : celui d’un artiste qui photographie l’amour et la fragilité avec une poésie visuelle inédite.

© Mamika par Sacha Goldberger

Chez Goldberger, les références sont légion : le cinéma expressionniste allemand, les comics américains, les peintres flamands, Kubrick, Helmut Newton… Pourtant, son style ne plagie jamais. Il cite, détourne, recompose, et transforme. Un hommage permanent à la culture visuelle, assumé et jubilatoire.

La lumière ? Théâtrale, presque divine. Les personnages ? Archétypaux, toujours magnifiés. Le propos ? Surréaliste mais jamais abscons. Sacha Goldberger crée des mondes.

Pierre Richard en spermatozoïde par © Sacha Goldberger

Ce qui frappe chez Goldberger, c’est aussi son sens du détail et sa dévotion au travail en équipe. Costumiers, maquilleurs, coiffeurs, comédiens : chaque shooting est une mini-production cinématographique, pensée comme une œuvre collective. Il ne se contente pas de capturer, il construit.

Son studio, c’est un laboratoire visuel où l’on modèle l’image comme un sculpteur pétrit son argile. Résultat ? Des photographies à la croisée des arts plastiques, du théâtre, et du conte.

Sacha Goldberger a un humour à part, celui qu’on reconnaît entre mille, pétri de culture juive, d’autodérision, de tendresse, et d’un brin de tristesse masqué par un éclat de rire. Un humour qui sait que le monde est parfois absurde, souvent dur, mais que l’amour et une cape rouge bien portée peuvent le rendre supportable.

En somme, Goldberger ne photographie pas pour montrer. Il photographie pour relier. À la mémoire, à la famille, à l’imaginaire. Et à nous tous.